Géminides 2012, et si on faisait un peu de science ?

Depuis quelques années, la fiabilité des prévisions des essaims d'étoiles filantes s'accroît nettement. Tout du moins pour les plus connus. En effet, les modèles de prévision se basant notamment sur les observations, les essaims les plus étudiés sont aussi les plus prévisibles.

Les éphémérides reposent sur la dynamique du nuage de particules laissé dans le sillage de la comète parente. Le modèle de cette dynamique repose quant à lui sur les propriétés physiques des particules émises, l'orbite de la comète parente, les complexes interactions gravitationnelles provoquées par l'ensemble des corps du système solaire ainsi que de nombreux autres paramètres comme, par exemple, l'influence du vent solaire.

Chacun de ces paramètres repose lui-même sur des modèles dépendants de nombreux autres paramètres. Tous ces modèles ne sont que théoriques et comportent par ailleurs de belles plages d'incertitudes. Comme tous modèles théoriques, ils doivent être contraints par l'observation. Indispensable, l'observation permet de vérifier l'efficacité des modèles, et de les affiner. À ce stade, la démarche solitaire de l'astronome professionnel -- même extrêmement motivé -- ne suffit plus.

Désireux d'éphémérides précises pour lui indiquer l'heure du maximum de la « pluie » annoncée d'étoiles filantes, l'astronome amateur pourrait se montrer très agacé si le pic prévu s'était en fait produit 6 heures plus tôt. Et pourtant, c'est à lui de voler au secours de son acolyte professionnel pour obtenir, à l'avenir, de meilleures prévisions.

Les comptes rendus d'observation d'étoiles filantes manquent cruellement. Lors du pic de l'essaim des Perséides 2012, certainement l'essaim le plus observé en raison des chaudes températures estivales et des vacances, un seul et unique observateur présent sur le territoire français a rendu compte de son observation à l'organisation internationale chargée de centraliser ces données. Preuve indéniable du manque d'intérêt français pour le sujet : il s'agissait d'un observateur belge.

Pourtant, le leadership en matière de modélisation professionnelle est bel et bien français. En 2003, Jérémie Vaubaillon soutient sa thèse sur le sujet, modélise la dynamique de plusieurs dizaine de nuages de particules et contribue à améliorer grandement la précision des éphémérides. Aujourd'hui professionnel à l'institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides (IMCCE, observatoire de Paris), il peine à motiver les amateurs.

Le matériel requit n'est pourtant pas des plus inabordables. Il suffit d'une paire d'yeux (bien qu'un seul devrait pouvoir faire l'affaire), d'une montre, d'une feuille et d'un crayon. Du point de vue des compétences, savoir compter jusque 50 est un plus, bien que pas forcément nécessaire. Un compteur à main est d'un confort non négligeable. La procédure est assez simple : il suffit de compter le nombre d'étoiles filantes par tranches de 15 minutes de temps. Pour améliorer la qualité du compte-rendu, quelques informations subsidiaires peuvent être rapportées : localisation géographique, couverture nuageuse, magnitude visuelle limite à l'œil nu... Les observateurs les plus assidus peuvent améliorer encore leurs observations en comptant séparément les étoiles filantes sporadiques et en évaluant la magnitude des météores.

Une caméra haute sensibilité peut aussi être mise en place pour détecter automatiquement les étoiles filantes. Par contre, seules les plus brillantes seront comptées. La démarche est plus complexe et conseillée aux vrais passionnés. Le radioamateur peut quant à lui mettre à profit le phénomène de réflexion des ondes radios sur le fuseau ionisé de l'étoile filante pour effectuer son comptage. Avantage indéniable : les observations se font aussi en journée.

Bref, quel que soit le niveau de compétence, chacun peut se rendre utile.

Le prochain rendez-vous est avec les géminides, le 13 décembre 2012. ZHR estimé à 120, pour un pic prévu à 23h30 TU ; et durant la nouvelle Lune. Bref, des conditions idéales (si on omet la météo). Une belle occasion pour s'essayer à l'astronomie participative !

Pour ma part, je serai à l'observatoire Sirene pour essayer d'apporter une modeste contribution à la science.

N'hésitez pas à organiser une « soirée comptage » au sein de votre famille ou de votre club !

Bonnes observations !

Liens utiles

International Meteor Organization : www.imo.net

Notamment :

Page dédiée de l'IMCCE : www.imcce.fr/langues/fr/ephemerides/phenomenes/meteor/database.php
Thèse de Jérémie Vaubaillon : www.imcce.fr/public/theses/vaubaill_thes.pdf
Réseau français d'observation de météores (REFORME) : www.reforme-meteor.net
Base des observateurs de météores (BOAM), dédiée aux caméras automatiques : www.boam.fr
American Meteor Society : http://amsmeteors.org
Les géminides, chez notre ami Gilbert : http://pgj.pagesperso-orange.fr/12-Geminides.htm

Merci à Jérémie Vaubaillon pour sa conférence des rencontres du ciel et de l'espace du mois dernier (www.afanet.fr/RCE/PresentationsRCE2012/S2-0211-J.Vaubaillon.pdf, 17 Mo), ainsi qu'à François Colas pour celle concernant le projet FRIPON (www.fripon.org) et Jean-Louis Rault sur l'observation des météorites en radio (www.afanet.fr/RCE/PresentationsRCE2012/S2-0111-JL.Rault.pdf, 2,5 Mo).

Publié le

Mardi 4 décembre 2012 à 14h24

Commentaires

Merci Cyp pour ce remarquable article militant...

Pour ma part, je serai dans le désert de Wadi Rum, en Jordanie, le 13 au soir pour photographier ces Géminides !!!

À bientôt...

JP

Salut Jean-Pierre ! Hé bien on s'embête pas à ce que je vois Smile En tout cas je te souhaite bon voyage et j'espère que tu ramèneras de belles photos d'étoiles filantes ! Je pense que je laisserai aussi traîner l'appareil photo pour essayer de choper quelque chose Wink Au pire ça fera un joli filet d'étoiles ! Enfin... S'il fait beau... Bonne chance !

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